Depuis le début de la campagne des européennes, les listes multiplient les annonces autour de la présence de candidats issus de la société civile. Des candidatures hors du système politique chez Les Écologistes, mais pour quel impact électoral ?
Des ronds-points des « gilets jaunes », aux bancs de l’univeristé en passant par les studios de RMC. En vue des élections européennes du 9 juin, Les Écologistes parient sur la société civile.
« L’ADN des écolos »
Cette présence importante de nouveaux venus pour les européennes n’est pas inédite pour le parti. En 2009, Europe Écologie avait basé son succès sur la société civile en remportant 16,30 % des voix. Ce phénomène existe depuis la création des Verts en France en 1984. À titre de comparaison, aux municipales 50 % des inscrits sur les listes de chaque parti doivent obligatoirement appartenir à la société civile. « Les candidatures de la société civile, c’est l’ADN des écolos », se targue un proche de Marie Toussaint, tête de liste pour les européennes. Désormais, ils rempilent pour un second mandat. Chez Les Écologistes, Caroline Roose, experte immobilière et Benoît Biteau, agriculteur, élus il y a cinq ans sont placés respectivement 7e et 8e sur la liste.
« Les gens doivent se sentir représenter par le parti »
Dans un contexte de colère des agriculteurs et de situation défavorable pour le pacte Vert européen, l’équipe de campagne se dit victime de « backlash » (« retour de bâton »). « La tendance est au détricotage de l’ambition européenne environnementale. Le vent est de face. » En 2019, Yannick Jadot, tête de liste, en atteignant 13,6% des voix, avait bénéficié d’une dynamique écologique en raison des mouvements « Youth for the climate ».
Cette année, Les Écologistes plafonnent dans les intentions de vote. Un dernier sondage Ifop-Fiducial crédite Marie Toussaint de 8 % des voix. À ce stade, le parti pourrait faire élire sept à huit candidats. Le positionnement sur la liste joue donc toute son importance. 5e position pour Majdouline Sbai, professeure de sociologie, 9e pour Priscillia Ludosky, « gilet jaune » et 11e pour Flora Ghebali, chroniqueuse sur RMC, cette liste a pour but de « refléter les enjeux de la société. Tous les gens doivent se sentir représentés par le parti », défend le proche de Marie Toussaint.
Lire aussi. Coups bas, « affaire Bayou »… Chez les écolos, le supplice de Marie Toussaint avant les européennes
« Le parti a à cœur de proposer des candidats non-adhérents plutôt bien placés sur la liste pour qu’ils aient une chance d’être élus », poursuit Madjouline Sbai, professeure de sociologie, 5e sur la liste. Tout comme d’autres candidats novices en politique, l’universitaire se retrouve dans la ligne du parti pour défendre une société « plus émancipatrice, juste, égalitaire et démocratique ». Bien qu’elle soit novice en politique, Madjouline Sbai se dit « toujours enthousiaste quand il s’agit d’assister à réunions publiques ou de tracter ».
« Bien adaptés à la sphère européenne »
Sur les réseaux sociaux du parti depuis quelques jours fleurissent des vidéos de présentations des candidats. C’est le cas avec Priscillia Ludosky, ancienne figure du mouvement des « gilets jaunes » en 2018. La 9e sur la liste est engagée pour la justice sociale, la jeunesse et la cohésion des territoires. « Sincère, spontanée, déterminée et humble », appuie sur ses réseaux sociaux Marie Toussaint, tête de liste. Les deux jeunes femmes publient en 2019 un livre intitulé Ensemble nous demandons justice. Une candidature qui fait pourtant réagir. Pour certains, écologie et « gilets jaunes » ne s’accordent pas.
Le chercheur Maxime Gaborit remarque que ce mouvement social, débuté en 2018, s’est emparé des préoccupations environnementales, tout en remettant en cause une « écologie des élites », relate-t-il dans un entretien donné au Figaro en 2020. « Les personnes les plus précaires sont contre la violence environnementale. Fin du monde, fin du mois, même combat », soutient Sofian Mahbaz, trésorier des Jeunes écologistes bretons.
Priscillia Ludosky, une candidature « intéressante que j’ai accueillie à bras ouvert », affirme le militant écologiste. Une stratégie qui aspire à drainer des votes de gauche. Manon Aubry, candidate LFI est au plus haut dans les sondages, à 8 %. L’ancienne « gilet jaune » apparaît indéniablement comme une figure de gauche. Dans un entretien accordé à Politis, elle souhaite « réconcilier les partis et les mouvements sociaux ».
Si la candidature d’une figure prééminente des « gilets jaunes » rassure Sofian Mahbaz, au contraire celle de Flora Ghebali, chroniqueuse sur RMC le rend plus perplexe. « Maintenant que c’est lancé, on ne peut pas aller contre », soupire-t-il. Le parti justifie que ce choix politique envisage de siphonner des voix de centre-gauche et centre-droit. En ligne de mire : affaiblir Valérie Hayer, candidate Renaissance, créditée de 17 % selon les sondages.
Les candidats issus de la société civile sont souvent bien adaptés à la sphère européenne. Des députés européens appréciés mais qui au bout de cinq ans de mandat doivent rentrer dans le système politique, l’usage de l’étiquette « société civile » n’étant plus une réalité.